Les fédérations sportives et leurs structures déconcentrées : examen de leur activité durant la crise.

Gérard PERREAU-BEZOUILLE a été auditionné dans le cadre de la mission lancée par l’Inspection générale de l’éducation nationale, des sports et de la recherche (IGESR) : “Les fédérations sportives et leurs structures déconcentrées : examen de leur activité durant la crise”.
L’entretien détaillé avec Fabien Canu et Juliana Rimane, Inspecteurs Généraux , a duré 2 heures. Voici les éléments présentés par le président de la FFCO et les quelques “leviers” qu’il a présenté.

Chacun doit en avoir conscience : les clubs omnisports sont décisifs pour le sport français, en matière de réponse aux demandes, aux nouvelles aspirations, en matière d’emploi et d’ancrage local. Pour autant, confrontés à des défis spécifiques, ceux-ci restent trop méconnus : il subsiste un déficit de connaissance sur nos clubs omnisports qu’il est décisif de combler.


La FFCO n’est pas seulement leur fédération atypique, c’est aussi un creuset, un laboratoire d’idées pour stimuler les dirigeant.e.s afin de faire face aux enjeux d’aujourd’hui et de demain.


Concrètement, la FFCOtravaille à :
• tirer les meilleures idées du terrain et les essaimer, en les adaptant aux divers contextes, sur le territoire national ;
• mutualiser les expériences et valoriser les témoignages de dirigeant.e.s ;
• les relier au sein d’une communauté de recherche participative.

Ä Faire ainsi émerger et défendre des idées pour que les clubs soient mieux reconnus.


Son ambition : Des dirigeant.e.s riches d’expérience, intégré.e.s dans des réseaux (et donc non isolés) et épanoui.e.s pour des clubs omnisports dynamiques et réactifs.

La crise actuelle dépasse largement son aspect sanitaire, elle est aussi révélatrice de l’état de santé des gens, du système hospitalier, du système sportif, plus globalement du monde. Ses implications ne sont souvent que la confirmation de diverses questions déjà posées en amont.

1 – CRISE DES CLUBS, CRISE DES DIRIGEANT.E.S, COMBINÉES

Les dirigeant.e.s ont connu une dégradation de leur état de forme, entre le ralentissement forcé de leurs activités en mars et les espoirs de reprise de la rentrée sportive. La crise correspond à la rupture d’un équilibre.

Les systèmes et les hommes sont alors soumis à une mise en tension brusque et intense, dont l’issue sera déterminante pour leur pérennité et leur bon fonctionnement.

La crise s’impose à tous comme source de dangers, de troubles et de dysfonctionnements majeurs.

Plus le club traverse une crise aigüe, et plus l’état de forme de ses dirigeant.e.s se dégrade. Si cet état a commencé à stagner, c’est loin d’être positif, ne révèle-t-il pas une certaine accoutumance, un renoncement, une situation de rejet, l’idée de ne pas pouvoir entrevoir « le bout du tunnel » avec tous les risques que cela recèle ?

2 – COMBATIVITÉ ET RÉSILIENCE : LES DIRIGEANT.E.S DE CLUBS FACE À L’ADVERSITÉ

Malgré le caractère inédit de la crise sanitaire et son impact immédiat sur les activités, la détermination des dirigeant.e.s n’est pas trop ébranlée. Loin de se laisser accabler, aucun de ceux qui ont gardé le contact n’a jamais songé à abandonner. Et malgré le coup dur du second confinement, ils étaient encore nombreux à ne pas baisser les bras.

Une des raisons de cette résilience : outre les difficultés et l’anxiété qu’une crise implique pour eux, certains peuvent entrevoir aussi la crise comme une source d’occasions, constater que ce qu’ils avaient diagnostiqué à propos de l’évolution en profondeur du sport français est confirmé.

3 – LA STRATÉGIE DANS L’URGENCE

Lorsque le Covid-19 a bouleversé leur fonctionnement habituel, une majorité de clubs ont été saisis par un besoin d’agir tout de suite. À l’inverse, peu se sont sentis sidérés face aux événements, au point de ne pas réagir pour débloquer la situation.

La crise est donc indissociable d’une prise de décision rapide. Pour autant, ils n’ont pas confondu réactivité et précipitation, ni tout remis en question sous la contrainte.

Les dirigeant.e.s ont ainsi, sous la pression des événements pris conscience de la nécessité d’avoir une vision claire de leur projet, de le préciser pour prendre des décisions efficaces, de bien identifier et expliciter les priorités.

4 – LA CRISE : UN RÉVÉLATEUR POUR LES CLUBS

Les forces et faiblesses qui préexistaient sont ainsi exacerbées.  Tous les fondamentaux des clubs sont mis à l’épreuve : la prise de conscience des évolutions en cours, du modèle dominant disciplinaire vers des actions plus transversales, du cartel de sections à la mise en cohérence d’actions omnisports, de l’offre au sens strict à une prise en compte des diversités de la demande.

Dans certains clubs, ce moment de vérité a révélé des bénévoles, des professionnels engagés et des relations solides avec certains partenaires. Dans le même temps, à l’inverse, la crise peut dévoiler l’indifférence de certains au sort de leur club, ainsi que certaines tensions latentes avec des partenaires habituels.

5 – LE SPORT : PAS UN RISQUE, MAIS UNE OPPORTUNITÉ

 Non, la pratique d’activités sportives n’est pas le lieu de tous les dangers, le cluster, un point de départ de la contamination. Ce n’est pas une activité mineure, non indispensable. On ne peut pas prêcher pour un sport résolument tourné vers la santé, un sport réparateur – du sport sur ordonnance aux maisons sport / santé – et, en ces moments de confinement, de repli sur soi, ne pas prendre en compte qu’il reste le moyen d’avoir dans les formes adaptées l’activité physique absolument nécessaire à la vie. Et attention, c’est l’espace de convivialité, de proximité et d’échange contre tous les replis, le plus ouvert à chacun, quels que soient son origine et ses moyens.

6 – L’ÉCHANGE AU CŒUR DES DÉCISIONS

La confrontation d’idées et le partage d’expérience, la mutualisation de solutions, comme le propose notre fédération, permettent d’être plus assuré dans ses décisions, tout particulièrement en période trouble.

La vertu de l’échange passe aussi par l’interne, par la confiance et le dialogue dans les équipes. Cette vertu peut également s’opérer par des échanges avec des interlocuteurs divers, parfois éloignés du sport, sur les questions d’organisation, de sens, de traduction des valeurs en actions.

Il s’agit de prendre conscience de son « espace », de sa « surface » et de bien identifier tout son écosystème pour s’appuyer sur les potentiels ainsi découverts.

7 – DEVANT L’ADVERSITÉ, LA FORCE DE L’OMNISPORTS

Le contexte et l’histoire interviennent pour comprendre au mieux le vécu d’une crise. Les structures unisport déjà fragiles, esseulées, ont plus de mal à mobiliser leurs forces afin d’affronter une épreuve supplémentaire. La puissance du collectif, du transversal, du global s’est renforcée au fil des épisodes les plus tumultueux, non seulement pendant les périodes d’isolement liées aux confinements, mais pour imaginer les solutions pour traverser cette crise et pour envisager l’avenir.

Cette confiance est un point de repère important pour travailler le devenir du mouvement omnisports dans cette dynamique.

8 – SAVOIR SAISIR L’OCCASION DE SE TRANSFORMER

Cette expérience de crise peut être enfin l’occasion d’un rebond positif, d’une redéfinition des fondamentaux de club, de la prise en compte des nouveaux enjeux sociétaux du sport et donc de mettre en œuvre une nouvelle ambition pour l’avenir.

La crise du Covid-19 peut et doit inciter à accélérer le développement d’innovations. Ces transformations en période de crise peuvent aussi concerner l’activité même du club : des clubs envisagent de modifier leur modèle d’activité pour rebondir, gagner en identification dans les mois à venir.

Si l’agilité et l’adaptation sont importantes et de circonstance pour évoluer, il s’agit aussi d’avoir la capacité de garder le cap du projet, de le préciser, de mettre en conformité action et valeurs.

Pour le sport dans son ensemble, la crise peut ainsi être l’occasion d’améliorer ce qui n’a pas fonctionné – les constats étaient déjà nombreux -, de bâtir de nouveaux fondamentaux et de repartir plus fort. Dans un secteur en pleine mutation comme le sport dont le modèle dominant est bloqué, la situation peut en être un accélérateur pour les lancer et les pérenniser.

En conclusion, pas de modèle, mais quelques leviers :

1 Prendre en compte le poids du passé : la bonne gestion de la crise et de l’après a ses racines dans l’avant

2. Mieux comprendre son club, ses rouages, les interrelations, son environnement et son rôle de dirigeant.e. pour repartir plus fort

3. Revendiquer à tous les échelons toute leur place pour les A.P.S. et valoriser leurs apports dans toutes les dimensions de la vie

4. Retravailler l’organisation, repenser la circulation de l’information, redéfinir la communication

5. adopter des outils de gestion de crise et anticiper l’après : des solutions immédiates aux profondes transformations

6. en profiter pour expérimenter et innover

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