A l’heure où nous écrivons ces lignes (début juin), la campagne pour « conquérir » le CNOSF est entrée dans sa phase finale.
Quelques points de repères :
– Le CNOSF est le « représentant » du mouvement sportif (l’article L141-1) mais, du fait de son adhésion au CIO, fait la part belle aux fédérations Olympiques dans ses statuts (majorité) et dans ses actes, ce qui apparait contradictoire
– A la limite d’une entité publique, du fait de l’originalité du modèle sportif français, il est doté d’un budget conséquent d’où, aussi, l’importance de cette élection. Cependant, quand il s’agit d’organiser les JOP à Paris, c’est directement le CIO et le plus haut niveau de l’Etat qui négocient les grands enjeux, jusqu’aux modifications des lois.
– Des structures ad hoc indépendantes ont été créées : la SOLIDEO pour traiter des enjeux urbains et ils sont d’importance et un COJO qui gonfle en effectifs et en identité. Quelle place occuperont ses cadres après 2024 ?
– Dans la dernière période, ce qu’il est convenu d’appeler la « gouvernance » du sport a profondément changé avec la création de l’ANS et de ses déclinaisons régionales
– Le fonctionnement actuel du CNOSF interroge et se traduit par des difficultés de pilotage : réunions de fédérations à géométrie variable (en 2, 3, 4 groupes, convocations surabondantes d’AG, de congrès…)
Il s’agit d’une élection de type confédéral : ce sont des grands électeurs qui votent, avec un calcul de voix complexe. Chaque président de fédération mettra dans l’urne, le jour J, dans la solitude d’un bulletin secret, un certain nombre de voix (de 2 à 20).
Un tel système ne favorise pas les évolutions, les innovations nécessaires, les propositions de réforme ; pour obtenir des voix, il convient surtout de respecter un statu quo, un certain ordre établi, de négocier des accords notamment avec les fédérations portant le plus de voix … D’autant qu’ensuite toutes les fédérations, les plus grosses, qui disposent aussi de plus de moyens, comme les plus petites dont est issu le président actuel, Denis Masseglia, garderont une totale indépendance, resteront souveraines.
Comment dans ce contexte prendre en compte ce qui bouge dans le sport mais est ainsi bien peu « représenté » ? Le CNOSF ne peut pas être le « laboratoire » du mouvement sportif qu’il devrait être.
Ce serait peut-être beaucoup plus simple si le sport n’était qu’une affaire de discipline car celles-ci, olympiques ou non, ont acquis une place prépondérante. Personne ne le conteste. L’Etat a mis aussi de l’ordre en désignant des fédérations délégataires.
Les fédérations affinitaires ont-elles mêmes structuré un travail par discipline… dans les clubs omnisports se sont les sections. Par thème, par corporation, par points d’entrée multiples, d’autres « verticalités » se sont constituées… chacune de ces démarches correspond à des besoins, apporte une part de solutions.
Bien difficile dans ce contexte d’impulser la transversalité nécessaire, de faire prendre en compte cette horizontalité qui fonctionne pourtant au quotidien sur le terrain, notamment dans les clubs omnisports… Cette dimension est pourtant particulièrement efficace pour mettre en œuvre la plupart des politiques liées au sport (sport-santé, féminisation, lien à l’éducation…) et prendre en compte les changements dans la société, les mutations profondes dans les besoins et les aspirations des gens. Elle donne de l’agilité, permet les expérimentations, s’appuie sur de nouvelles solidarités, de nouvelles façons de s’engager, de « faire association ». Bien difficile de donner une vitalité nouvelle au fait de « se fédérer », c’est à dire mettre en commun : la force d’un projet est d’être partagé.
Comme nous l’avions décidé lors de l’Assemblée Générale, nous nous sommes entretenus avec chaque candidat, nous avons dressé ce tableau, posé des questions, illustré et défendu ce « sport près de chez nous » que nous avons à cœur et son organisation en clubs omnisports, dans leurs diversités ; nous avons écouté les propositions ; nous avons participé à des ateliers, à des échanges… Des comptes rendus réguliers ont été effectués.
Pour faire avancer les questionnements, même s’ils étaient à notre sens encore incomplets, nous avons signé la lettre aux candidats proposée par certains présidents de fédérations olympiques.
Bref nous avons témoigné.
Les camps, les clans se sont structurés pour mieux se retrouver ; une espèce de gagne terrain est engagé, que va-t-il apporté ? il y aurait, selon certains observateurs, le candidat.e. du sport professionnel, le candidat.e. du sport olympique, le candidat.e. de l’affinitaire… et « les tractations seraient en cours ». Est-ce aussi simple ?
Mais aussi, des exclusions se mettent en place : tel ou tel ne serait plus le bienvenu dans les groupes de travail de tel candidat, telle fédération serait vue d’un mauvais œil par ses pairs du fait d’une de ses initiatives…
Il y a visiblement un ou des « politiquement correct », des partages de territoires, de propriétés autoproclamées, à respecter pour être dans le coup. Comme partout, ce qui est nouveau, même embryonnaire, dérange.
Chaque candidat a présenté officiellement son programme le 27 mai. Un grand oral est organisé par le CNOSF le 16 juin. Pour notre part, nous organiserons ensuite, sur la base de tous ces échanges mis à leur disposition, une consultation de nos adhérents.
Le système reste très figé dans le modèle économique compétitif / historique. La relation aux clubs est particulièrement mise en avant dans les discours mais reste dans les faits surtout basé sur la remontée des licences, enjeu financier pour les fédérations.
Le risque est grand que la juxtaposition de verticalités –concurrentes ou complémentaires– continue ainsi de se perpétuer, de s’ossifier, en contradiction avec toute une partie de ce qu’est le sport sur le terrain, le sport du quotidien.
La FF Clubs des Omnisports a donc très tôt échangé avec chaque candidat et apporté sa vision. Nous sommes conscients de la –petite – place occupée par cette démarche omnisports fédératrice mais aussi des apports potentiels de ce regard diffèrent, de la prise en compte de ce qui est en train d’émerger. Nous serons donc disponibles pour contribuer, pour travailler aux réformes nécessaires, auprès de celle ou celui qui sera élu, de l’équipe qu’il aura constituée et dans laquelle les opposants d’un temps –nous n’en doutons pas– prendront place.